Le gouvernement congolais face au défi éthique de sa fonction publique

16 février 2021

Le gouvernement congolais face au défi éthique de sa fonction publique

Avec la nomination d’un nouveau Premier ministre, le président Félix Tshisekedi affiche sa volonté de renouveler la classe politique congolaise. L’objectif : parvenir à insuffler une nouvelle dynamique à ses efforts pour mettre en œuvre les profondes réformes qui s’imposent aux plans institutionnel, politique, économique et socio-culturel. Ces réformes doivent s’attaquer aux problèmes structurels qui empêchent le pays de décoller et d’accéder au développement, malgré les immenses potentiels dont il regorge.

Le nouveau premier ministre, Sama Lukonde Kyenge, est donc attendu sur tous les fronts et devra s’appuyer normalement sur une administration publique, capable de mener à bien la mise en œuvre de politiques publiques et de programmes gouvernementaux, afin de réaliser les objectifs qui lui ont été fixés par le chef de l’État.

Manque d’efficacité de l’administration publique

En effet, l’administration publique étant l’affirmation de la puissance d’un État, on peut donc imaginer le rôle important que devra jouer la fonction publique congolaise. Celui d’accompagner le nouveau gouvernement au cours de trois prochaines années, dans le processus de prise des décisions judicieuses en matière de politiques publiques. Pour enfin relever les défis immenses de reconstruction du pays.

Seulement voilà, comme nous le disons constamment dans nos écrits, la structure de gestion et le fonctionnement de l’administration publique congolaise actuelle ne sont pas assez efficaces. En tout cas, pas assez pour répondre aux exigences opérationnelles d’une administration moderne.

De plus, le manque de contrôle rigoureux et de maîtrise des effectifs réels de la fonction publique congolaise est un des défis majeurs auxquels le prochain ministre devrait s’atteler avec fermeté, pour assurer une gestion efficiente des ressources humaines et financières de différents ministères du gouvernement.

En effet, l’absence de progrès marquants dans les efforts d’éradiquer le phénomène de fonctionnaires fictifs a eu pour effet d’accroître la masse salariale qui se volatilise sous forme de détournement des deniers publics. Sinon, comment expliquer que l’enveloppe salariale destinée à la Fonction publique explose littéralement au fil des années sans que cela puisse améliorer les conditions de vie et de travail des fonctionnaires et agents publics réellement en fonction ? De plus, il s’ajoute une sérieuse préoccupation éthique sur la fonction publique congolaise, qui s’exprime par le manque de confiance du public à l’égard de celle-ci.

Ainsi pour pouvoir relever efficacement les nombreux défis auxquels est confrontée actuellement la fonction publique congolaise, il faudrait commencer d’abord par relever les défis éthiques qui viseraient à encourager l’intégrité, l’honnêteté, la transparence et la responsabilité chez les agents publics, dans l’utilisation des ressources de l’État mises à leur disposition.

Le prochain ministre de la Fonction publique devra s’atteler à établir de solides valeurs et des normes d’éthique élevées, y compris un cadre stricte régissant les conflits d’intérêts, décrivant le comportement qui est attendu d’un agent public, qui devront guider tous les ministères et organismes publics afin de s’acquitter de leurs responsabilités efficacement et d’atteindre la transparence escomptée dans la fonction publique.

Un cadre juridique, sous forme d’un Code de valeurs des services publics et d’éthique dans la fonction publique, qui définisse la façon dont tout mandataire public, haut fonctionnaire et agent public devrait exercer son jugement dans l’exercice de ses fonctions officielles, permettrait d’élever le niveau d’engagement en matière d’éthique dans la fonction publique.

En prenant de telles initiatives courageuses en faveur de la transparence dans la gestion des deniers publics, on peut ainsi mettre l’accent sur la responsabilisation et la nécessité d’un comportement éthique irréprochable, qui fait obligation au fonctionnaire public d’agir dans l’intérêt supérieur de l’État, ce qui pourrait garantir une utilisation efficace et efficiente des ressources publiques.

Mais tout compte fait, le manque d’un plan cohérent de modernisation de l’administration publique congolaise et d’adaptation de ses structures aux nombreux défis actuels qu’elle doit relever, est un sérieux problème et un défi majeur que le prochain ministre de la Fonction publique devra s’atteler à relever en priorité, pour assurer la réalisation des objectifs socio-économiques que le chef de l’État a assigné au gouvernement durant la deuxième moitié de son quinquennat.

Isidore KWANDJA NGEMBO, Politologue et Diplômé en éthique publique

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